Le sentier rejoint le port de Biganos par sa rive droite à hauteur d’un petit bois de chênes. Une silhouette s’en détache, marque un temps d’arrêt avant de replier une carte et de la glisser dans un sac à dos posé au sol. Durant quelques secondes un faisceau lumineux trace d’étranges circuits sur le toit noir de la nuit avant de disparaître au fond d’une poche. L’écran du portable affiche trois heure cinquante sept. Un imprévu l’a obligée à modifier le parcours initialement planifié depuis l’hôtel. La marche en a été retardée ; il est temps de rejoindre le lieu du rendez-vous. Elle avance maintenant en territoire connu et se fait une alliée de l’obscurité. Il lui faut quitter le couvert des arbres, filer droit devant jusqu’à une échancrure plus claire sur l’écran nocturne indiquant le lit de la rivière. Le projecteur de la lune l’aide dans sa progression rapide révélant entre le dos des cabanes de planches bordant le chemin, des tables de bois, quelques arbres penchés au- dessus d’embarcations alanguies . Un vague passage bordé d’une haie odorante de prunelliers piqués de blanc conduit à l’entrée du petit port. Son pas s’accélère. Une légère brise nord-ouest révèle l’odeur miellée du tabac puis un point de braise s’allume en contrebas du quai. Le contact est là, assis sur un canoe renversé au niveau de la cale de mise à l’eau des bateaux. Elle hésite un instant puis s’engageant dans le passage devant elle, toussote pour annoncer sa présence. La consistance du sol a brusquement changé aussi doit-elle se retenir à la murette entourant la cale pour ne pas glisser sur la pente envasée. L’homme se redresse déroulant un corps massif et porte la main à hauteur de sa tête. Probablement un salut auquel elle répond d’une voix étouffée. Sans plus de manières, il lâche un « Par là. Attention, ça glisse. » avant de projeter son mégot dans l’eau. L’interlocuteur joint quelques semaines plus tôt au téléphone a posé des conditions strictes à sa demande de sortie nocturne. Il se gardait le droit d’annuler l’expédition si le vent s’annonçait soutenu ou se renforçait dans le courant de la journée précédent le départ. Une pleine lune et un ciel dégagé permettraient une clarté maximale ; bien sûr une marée montante assortie d’un fort coefficient seraient obligatoires. Il serait seul juge de la faisabilité du projet, point. Dans un premier temps, déconcertée voire découragée par tant d’exigences, celles-ci lui parurent finalement relever du bon sens et être les garantes de la sécurité de l’expédition et du sérieux de l’encadrement. Un peu de rigueur dans l’aventure la rassurait. - « Là » dit-il pointant l’avant de l’embarcation. Il lui faut courber le dos, se tasser un peu pour enjamber les bords de la barque et prendre pied sans trop de tangage. Son sac à dos la déstabilise et la contraint à saisir vigoureusement le banc de bois fixé devant elle et à s’asseoir. Le gars s’affaire autour de la galupe, ses bottes piétinant la vase puis monte à son tour. Elle aurait préféré se trouver derrière l’homme. Cette position de figure de proue la rend soudainement vulnérable. Qui est cet individu au visage à peine tracé sous un large béret, avare de mots, peu aimable, avec lequel elle vient de se lier dans la pénombre ? Seule sur cette embarcation instable, loin de toute présence,elle est à sa merci. L’inquiétude s’invite, se nourrit de la forte respiration de l’inconnu, de l’incessant balancement sous ses pieds. Le gars reste debout un long moment, apprête le rafiot en silence. Elle le sent derrière elle et tente sans succès de chasser son appréhension. D’un puissant appui sur une longue perche le batelier arrache brusquement la barque du fond vaseux avec un fort bruit de succion. Bousculée par la vigoureuse secousse imprimée à l’embarcation, elle agrippe les rebords de bois de toutes ses forces afin de garder l’équilibre. L’embarcation retrouve rapidement une profondeur suffisante pour être aisément dirigée. Puis le batelier crache bruyamment, s’assoit et se saisit des rames. La galupe file sur l’onde brune. Le cours d’eau rejoint bientôt La Leyre dont la courbe dévoile une large étendue clapotante entre de solides rives. De hautes futaies de feuillus bordent la rivière, impriment sur le ciel profond de lents mouvements à peine audibles. La clarté nocturne installe aux pieds des arbres un enchevêtrement de longues herbes, de buissons tachés de clair, de végétaux qui semblent se disputer la berge en chuchotant. Au fil de l’eau, d’étranges spectateurs plongent leurs branches vers l’onde, saules et aulnes enlacés dans une lente chute. Parfois l’amicale présence d’une prairie entre les troncs bruns. Au dessus de l’équipage, des milliers d’étoiles tremblotent, clignotent, discutent entre elles du commencement des temps. La galerie s’étire dans la pâle noirceur des fins de nuit. Loin devant dirait-on, au bout de ce tunnel sans couvercle se devine le plastron gris du jour à venir. A coup sûr les arbres parlent dans leur dos. « Je suis incollable ! Vas-y, pose moi des questions ! » lui demande-t-elle pour la troisième fois. Jeanny ne doute pas un instant que son amie ait réponse à tout. Son projet d’expédition nocturne a pris forme ces dernières semaines. La réalisation de son mémoire de recherches comprendra un volet photographique. « Il s’agit d’un travail sur la lumière dans l’obscurité. Explorer l’obscur, en faire surgir sa lumière, son intimité ! » Elle rit. « L’eau sera l’élément support de mon projet artistique. J’ai besoin d’une belle nuit, d’une grosse lune et d’un plan d’eau accessible. J’ai une idée ! » Elle rit à nouveau. Sa passion à se saisir de la fugacité des rencontres, du « télescopage des impossibles » ou encore de « l’esthétique cachée des choses » comme elle aime à le répéter, l’habite toute entière tout autant que sa patience à attendre le temps qu’il faut et sa ténacité à présenter sa réalité du monde en fragments indéchiffrables. Les rames entaillent à peine la surface de l’eau, s’appuient sur le liquide glauque. La clarté lunaire joue sur les ondes, lance des serpentins d’ivoire en travers de la rivière. De chaque côté de la barque se propagent de souples ondulations déroulant un arc parfait jusqu’aux berges sombres. Une étoile filante lâche des poussières brillantes avant de s’éteindre. Depuis combien de temps ont-ils quitté le petit port niché au creux du delta ? Les minutes semblent maintenant répondre à une ordonnance mystérieuse qui lui échappe. Le cadencement des rames, le son de l’eau ouverte devant elle l’apaisent. Peut-être devrait-elle parler à l’homme posté dans son dos, lui offrir une cigarette mais elle n’ose pas se retourner, figée, les jambes sous elle dans le triangle aigu de l’avant. Des éclaboussures ont mouillé les poignets de sa veste, dégouliné le long de son sac à dos basculé à ses pieds. Sous les semelles de ses chaussures, la vase collante adhère au fond du bateau. Vaguement boudeuse, elle ramène la capuche de sa parka sur sa tête et fixe une étoile loin devant elle. Un hoquet de surprise et de peur lui échappe soudain. La galupe vire brusquement sur la gauche, quitte la rivière pour un cours d’eau plus étroit entre deux rives resserrées ourlées de vase brillante. Prompts à lâcher leurs fleurs de coton, les baccharis éclairent faiblement le fouillis végétal des berges hérissées de roseaux. L’homme manœuvre en jurant entre ses dents, écarte à l’aide des rames des branches grises coiffées d’herbe prisonnières de la vase. Une giclée visqueuse s’écrase à l’avant de la barque. D’étranges formes chevelues surgissent ça et là rendant la progression difficile. Des tamaris tordus pris dans l’étouffement des cotonniers cèdent peu à peu la place aux roselières bruissantes au-dessus de leur tête. - « On arrive. » grogne le gars en approchant un ponton en partie dissimulé par les roseaux. La galupe est habilement conduite et maintenue à un poteau de bois en partie enfoui dans la vase. Une petite échelle métallique dresse quelques barreaux peu engageants à la verticale de la barque. « Ici dans deux heures. »marmonne l’homme en vissant une cigarette sous sa moustache. Elle acquiesce d’un signe de tête suivi d’un « d’accord. »et ajustant son sac sur son dos se lève prudemment cherchant son équilibre. Puis, elle empoigne les montants glissants avec précaution, prend pied sur le ponton et rejoint la digue en quelques enjambées. L’étau dans sa poitrine se desserre une fois sur la terre ferme. Enfin, elle y est ! Elle n’en revient pas et se félicite intérieurement d’avoir tenu bon, vaincu ses peurs. Après avoir tiré ses bâtons de marche du sac, elle vérifie le rangement du Canon et du trépied sanglé dans son fourreau puis sort un mouchoir de sa poche pour essuyer les traces de vase sur son pantalon, ses mains aussi. Ne sachant que faire du papier visqueux, elle le glisse au creux des roseaux et se met en marche. A droite un tracé terreux dans l’herbe rase engage le pas vers un horizon rempli de ciel et de prés fantomatiques. Le domaine endigué semble s’étendre à perte de vue. De longs bassins d’eau immobile emprisonnés entre des levées de terre s’étendent de part et d’autre du chemin. Des chuchotements montant de la terre peuplent l’air. Elle frissonne, croise les bras sur sa poitrine et accélère le pas avec prudence laissant derrière elle un couvert confus de fourrés percés de rares arbres et de friche impénétrable. L’obscurité perd de sa puissance, lâche un peu de sa lumière révélant des formes aux contours encore indistincts. L’étonnante luminosité des rayons lunaires la presse de commencer son travail photographique. Rapidement extrait du sac à dos appuyé aux montants d’une écluse, le matériel est déballé avec précaution, l’appareil photo muni d’un puissant téléobjectif fixé sur le solide trépied. Agacée par le vol incessant de minuscules insectes autour de son visage, elle attrape une petite bombe d’insecticide et vaporise généreusement le produit sur ses veste et capuche. Une forte odeur âcre l’isole un moment du monde des vivants. Une bulle de silence accompagne ses derniers préparatifs. A la surface des bassins, sur l’eau indolente dansent de brillants éclats. Se font et se défont des milliers de reflets étincelants sous les lustres nocturnes. Capturer ces étoiles que la lune fait jaillir de l’eau sombre... Elle colle son œil à l’oeilleton et commence son travail de chasseuse d’images. Une légère vibration me fait relever la tête. Je frotte mon œil. Impossible d’en déterminer la provenance. Elle semble s’amplifier; je réalise alors qu’elle provient du sol. Je pense immédiatement à l’écluse dont je me suis peu éloignée. Probablement un mouvement d’eau entrante ou sortante qui cogne aux rives. Très vite je comprends qu’il est question de toute autre chose. Du fond du chemin que j’ai longé sur plusieurs centaines de mètres se détache une masse confuse. L’obscur tableau de végétaux en arrière plan m’empêche de distinguer de quoi il s’agit. Un martèlement sourdre sous mes pieds. Mon coeur s’emballe d’un coup. La masse grondante se dirige vers moi à toute vitesse. Une virée de gars à motos ou en quads ? Cette fureur venue de nulle part hurle que je dois me cacher dans les replis de la nuit. Je saisis vivement le trépied qui chute dans ma course. Je l’abandonne dans l’herbe. Je n’ai pas le temps de récupérer mon sac et me roule en boule sous les roseaux les plus proches. La peur frappe l’intérieur de mon crâne à coups de marteau. La chose envahit alors mon champs de vision. Des formes effrayantes armées de crochets, montées sur de courtes pattes surgissent à quelques mètres de ma tanière, se bousculent en une course effrénée. Des cailloux, des mottes de terre projetés avec violence retombent autour de moi. La terre tremble. L’air crache de rauques soufflements, d’épouvantables grognements. La terreur me paralyse. La harde s’éloigne aussi vite qu’elle a surgi. Quelques couinements aigus s’attardent. Le bruit sourd du martèlement des sabots sur la digue va diminuant. Je rampe hors de mon trou, m’assois les genoux ramenés sous le menton. Des tremblements impossibles à dominer agitent mes épaules. Les sangliers ont laissé derrière eux une forte odeur de poils mouillé et d’urine. Je laisse s’éteindre les étoiles. En sourdine, le jour à venir met en route l’orchestration naturelle des lieux. Des chuchotements prisonniers des roselières, un pitpitpit délicat auquel répond un coassement de grenouille si proche que je m’écarte vivement et me lève. Encore sérieusement choquée, je choisis de faire demi tour et rassemble le matériel. L’appareil photo encore fixé sur son trépied n’a pas été piétiné. Le système de fixation a subi des dommages dans sa chute et je peine à dévisser les deux parties de mes mains encore tremblantes. Laissé ouvert au pied de l’écluse, mon sac à dos plein de débris doit être vidé. Le fourreau du trépied se trouve dans le même état ! Alors que je m’apprête à la saisir, un mouvement singulier déplace l’étroite sacoche ; d’imperceptibles agitations venus de l’intérieur animent le tube de toile. Rapidement, je saisis mon bâton de marche et gifle l’herbe alentour, tapote l’étui afin d’en chasser un visiteur indésirable, une couleuvre curieuse, une vipère furieuse de s’être fait piégée. Je ne chasse que de frêles grelots nocturnes, des voix soufflées à la surface de l’eau, conversations intimes des invisibles. Le tube de toile orange luit sous les clartés célestes. Je décide de me suffire de cette lumière et recule d’un pas. De l’embout métallique du bâton je dégage l’orifice de l’étui tout en le sondant de légers coups. Une petite masse occupe le fond du sac renvoyant un son mat, rond. Je le prends par le fond et le secoue au-dessus du sol. Un galet ovale, légèrement bombé tombe à mes pieds. Quelques éclats d’or à sa surface me permettent de le distinguer. Je m’agenouille. Une tortue cistude plus petite que ma main gît à la pointe de mes chaussures. Je la soulève avec précaution ; elle tient dans ma paume, ridicule berceau. Quatre petites pattes griffues tachées de jaune s’étirent, une tête reptilienne d’un autre âge frôle ma peau. L’animal reste immobile un long moment, le cou tendu vers la lune offrant à mes yeux une carapace peinte par les dieux. J’allonge mes doigts sur l’herbe, lui demande pardon en effleurant la peau froide de son cou. La tortue se remet en marche avec lenteur, quitte ma main et ses griffes impriment une douleur dans mon coeur. Très vite elle disparaît dans la jonchaie dans un doux froissement de tiges sèches. Je referme mes doigts sur un nid vide. L’aimant terrestre attire alors mon buste vers le sol. Le visage contre les genoux, je mêle mes larmes à l’humidité de la terre. L’espace d’un instant, un oiseau raye la lune déclinante. Un escargot a tracé sa route au dos de ma veste.
Fabienne COZIC-LAMAISON: La forme de l'eau
Ce jour-là, le soleil illuminait la mer de ses feux et la faisait briller d’un million d’éclats, éblouissant Nicolas qui arrivait sur la petite plage isolée d’Andernos qu’il chérissait tant. Comme à son habitude, il terminait sa journée de travail par une échappée belle au bord de l’eau, profitant d’une reconnexion avec le vent, le sable, la mer et le calme avant de rejoindre sa meilleure amie Juliette autour d’un verre. Nicolas avait dédié sa vie à un travail extrêmement laborieux. Il passait ses journées à jongler avec des chiffres et des contrats dans un petit cabinet comptable... Lorsqu'il passait le pas de la porte à la fin de sa journée de labeur, il ressentait donc un besoin irrépressible de s’ouvrir à la plénitude que lui offrait les grands espaces du Bassin d’Arcachon avant de retrouver la vie réelle et son tourbillon incessant. Ce jour-là, cependant, n’était pas un jour comme les autres, et il allait bientôt l’apprendre à ses dépens... Il prit place dans le sable comme à son habitude et s’allongea sur le dos pour profiter du calme. Appuyé sur ses coudes, il admira l’horizon duquel il voyait dépasser les dentelles des villes d’en face. En effet, le Bassin était un de ces écrins de mer, créé par les océans qui s’étaient frayé un chemin au milieu des terres, ce qui en faisait un endroit préservé et calme. Cette pensée l’apaisa et il soupira profondément avant de basculer en arrière et de plonger son regard dans le ciel d’un bleu azur que le son du ressac accompagnait telle une douce berceuse naturelle. Il songea que rien ne pouvait plus troubler cet instant de sérénité, lorsque des éclaboussures accompagnées de cris stridents vinrent le faire mentir. Il se redressa promptement, surpris et quelque peu irrité, pensant que des enfants n’avaient pu s’empêcher de rompre sans ménagement ses rêveries. Cependant, son agacement fut de courte durée lorsqu’il tomba nez à nez avec une jeune femme étrange empêtrée dans des algues et du varec. Elle avait l’air complètement désorientée. La jeune fille était d’une beauté irréelle, de longs cheveux d’une couleur indescriptible lui tombaient en cascade sur les épaules et ondulaient dans le vent iodé du bord de mer. Ses yeux, d’un vert d’eau translucide, se détachaient sur sa peau halée et le fixaient avec incrédulité. Ses lèvres fines et son nez retroussé étaient crispés dans une légère moue dans laquelle semblaient se mélanger douleur et peur. Nicolas, pris de court par cette vision insolite, mit quelques minutes avant de reprendre ses esprits et lui porter secours. Lorsqu'il se redressa et se précipita vers elle afin de la dégager de ses liens, la jeune femme tenta de s'écarter, visiblement terrifiée par l'inconnu qui s'avançait vers elle. Il interrompit son geste et essaya une autre approche afin de ne pas l'effrayer davantage. - Je ne vous ferai aucun mal... murmura-t-il pour la rassurer en s'asseyant dans le sable, à quelques pas d'elle. Je m'appelle Nicolas, et vous ? La jeune femme le dévisagea mi-intriguée, mi-apeurée. Elle ne semblait pas comprendre les mots qui sortaient de sa bouche. - Ni... Nicolas ? répéta-t-elle de sa voix juvénile. - Oui, c'est mon prénom, comprenez-vous ce que je vous dis ? - Je... Oui... Oui, bien sûr, c'est seulement que... C'est la première fois que je m'adresse à quelqu'un comme vous. Je vous en prie, ne me faites pas de mal... implora-t-elle, visiblement effrayée par l'étranger. - Je vous promets que ce n'est pas mon intention... répéta-t-il doucement. Comment vous appelez-vous ? - A... Ariane... bredouilla-t-elle, toujours en état de choc. - Ariane, enchanté. Vous semblez être en mauvaise posture. Je vous en prie, permettez-moi de vous aider. La jeune femme sembla hésiter, détaillant tantôt son corps, entièrement pris dans les algues et le varech, tantôt son interlocuteur qu'elle semblait jauger afin d'estimer si elle pouvait lui accorder sa confiance. Elle finit par acquiescer d'un hochement de tête silencieux et Nicolas entreprit de la libérer de ses liens. La jeune infortunée aurait effectivement été incapable de se défaire de sa prison, car en plus des diverses algues, un filet de pêche avait entouré son corps entier, bloquant ses bras et ses jambes comme dans un étau. - Je peux savoir ce qui vous est arrivé ? risqua Nicolas en continuant de s'affairer à sa besogne. -Je... C’est une histoire compliquée... bredouilla-t-elle en évitant de croiser son regard. - Je comprends et je ne veux pas être indiscret, je... Les derniers mots de Nicolas se bloquèrent dans sa gorge lorsqu'il découvrit avec stupéfaction les jambes d'Ariane. Couvertes d'écailles d'un bleu opalescent, elles s'habillaient sur toute leur longueur de nageoires, semblables aux nageoires dorsales des poissons. Lorsqu'il finit de les libérer, des pieds palmés, loin de ressembler à ceux des humains, apparurent alors sous son regard ébahi. - Je vous en prie, ne me faites pas de mal ! se précipita de répéter Ariane lorsqu'elle lut la stupeur sur le visage de son sauveur. - Mon intention n'a pas changé, n'ayez pas peur, réussit à articuler Nicolas lorsqu'il reprit contenance. J'ai promis de vous aider et je tiens à respecter ma promesse. - Vous n'avez pas... peur ? demanda-t-elle avec appréhension. - En fait, je suis plutôt émerveillé et curieux, répondit-il avec sincérité. Ariane parut étonnée par cette réponse. Elle lui expliqua qu'elle n'avait jamais pu discuter avec des personnes comme lui auparavant, les humains. Le peu de contact qu'elle avait eu avec eux jusqu'à présent s'étaient soldés par de la peur et de la violence. Elle lui raconta comment elle était arrivée sur cette plage lorsque des pêcheurs les avaient vus nager, elle et son jeune frère aux abords de ce que les humains appellent l'île aux Oiseaux. Ils les avaient immédiatement pris en chasse avec leurs harpons et leurs filets. Elle avait pu se cacher sous l'eau malgré le filet qui l'avait atteinte, mais elle avait perdu son petit frère dans le tumulte de la bataille. Elle s'inquiétait énormément pour lui et craignait qu'il ne lui soit arrivé quelque chose. - Vous pourriez peut-être m’aider ! tenta-t-elle. Je ne peux me déplacer hors de l’eau, ce qui entraverait mes recherches... S’ils l’ont emmené sur leur bateau ou même sur terre, je risque de ne jamais le revoir ! Nicolas, bien que toujours sous le choc, croisa le regard empli de tristesse de la jeune fille. Il ne put s’empêcher de comprendre son désarroi, il n’imaginait même pas dans quel état il serait si on lui enlevait Juliette ! - C’est d’accord. concéda-t-il. Par où commençons-nous ? - Prenez cet anneau, il vous permettra de m’accompagner dans les fonds marins. De cette manière, nous y chercherons les premiers indices ! Elle lui tendit un vieil anneau qui semblait avoir plusieurs siècles. Recouvert de petits coquillages, il avait passé énormément de temps sous l’eau à subir les affres du temps et de l’érosion. Nicolas tendit une main tremblante et s’en saisit sans certitude. - Est-ce que je vais devenir l’un des vôtres ? - Ne vous inquiétez pas, il vous permettra simplement de respirer sous l’eau, ce n’est pas une transformation permanente. Ne le perdez surtout pas ! Il ne fait effet que si vous le portez à votre doigt ! avertit-elle très sérieusement. Nicolas approcha l’anneau de son doigt, il lança un dernier regard vers ses affaires étalées sur la plage. Dans quoi allait-il mettre les pieds ? Ariane sembla ressentir son hésitation et posa une main aussi compatissante qu’implorante sur la sienne. Il se retourna et croisa son regard juvénile et profondément triste. Aussi invraisemblable que lui parut cette histoire, il ne pouvait pas laisser cette pauvre jeune femme seule contre l’immensité de la mer et la cruauté des hommes qui lui avaient enlevé son frère ! D’un geste décidé, il enfila l’anneau à son doigt. Il inspira à plein poumons et ne vit aucune différence avec l’air qu’il respirait quelques minutes auparavant, il ne se sentait pas... changé. La jeune femme ne lui laissa pas le temps de se poser plus de questions. À présent libérée de ses liens, elle se saisit de sa main et l’entraina dans l’eau fraiche du Bassin. D’abord surpris, Nicolas fut pris de panique. Et si la sirène l’avait trompé ? Et si elle l’avait amadoué afin de l’entrainer dans les fonds marins pour le noyer comme il avait si souvent pu le lire dans les mythes et les légendes ? Il retenait son souffle de peur que des flots ininterrompus n’y pénètrent. Sentant sa crispation, l’être de l’eau s’interrompit dans leur descente aux enfers. Elle fit volte-face et planta son regard dans le sien avec un sourire rassurant, ses pupilles se dilatèrent étrangement lorsqu’elle s’adressa à lui. - Vous allez mourir si vous ne respirez pas. dit-elle avec douceur. N’ayez pas peur, inspirez... Il ne savait pas pourquoi, mais il était tout simplement incapable de lui désobéir. Il inspira profondément, relâchant la pression dans tout son corps. À son grand étonnement, l’eau entra dans ses poumons mais il ne suffoqua pas. Il la recracha de la même manière qu’il l’avait ingurgitée, en expirant doucement. - Pouvons-nous continuer ? demanda Ariane avec un sourire. Nicolas acquiesça, rassuré. Ils progressèrent très vite dans l’eau froide, évoluant parmi toutes sortes de poissons qui ne s’inquiétèrent pas de croiser leur chemin. Rapidement, les fonds marins se transformèrent, laissant place à des paysages bien différents de ce que Nicolas avait imaginé trouver en ces lieux. Des constructions réalisées à partir de coquillages et de roches pavaient le sable et des sirènes les dévisageaient sur leur passage. Ariane le guidait à travers ce paysage irréel. Le jeune homme, quant à lui, ne put s’empêcher de s’émerveiller. Des hippocampes qui jouaient avec les enfants, aux seiches qui taquinaient les hommes qui s’occupaient des constructions, tout ce qui l’entourait semblait tout droit sorti d’un conte. Ils traversèrent le village et progressèrent un moment sous les regards étonnés et apeurés des êtres de l’eau jusqu’à atteindre une forêt sous-marine. - C’est là que nous jouions avec Malo avant de nous faire attaquer par les pêcheurs. annonça Ariane. Nos assaillants auront peut-être fait tomber quelque chose qui nous donnera une piste de recherche. Ils fouillèrent un moment parmi les algues et Nicolas se trouvait sur le point d’abandonner lorsqu’il vit un objet briller au loin. - Là ! s’écria-t-il en se précipitant vers l’étincelle d’espoir. Ariane le rejoint et il lui tendit un porte clé portant l’inscription « Radeau de la Daurade ». - Le nom du bateau ? demanda Ariane. - C’est très possible. Regarde, il est amarré au port du Rocher si l’on en croit ce qu’il y a écrit derrière ! s’exclama Nicolas. - Tu sais où cela se trouve - Il me semble que c’est à La Teste ! Sais-tu comment nous y rendre Ariane acquiesça et l’entraina promptement dans son sillage. Le chemin lui parut interminable comparé à l’aller. Si on lui avait dit qu’un jour, il traverserait tout le Bassin à la nage, Nicolas ne l’aurait pas cru. A mi-chemin, Ariane poussa un cri strident et fonça vers les profondeurs. Le jeune homme la suivit, inquiet de savoir ce qu’elle avait découvert. Elle s’empara d’un objet qui gisait dans le sable et se redressa, troublée. Elle tenait un poignard dans le creux de sa main. - Il est à lui... murmura Ariane, la voix tremblante, nous sommes sur la bonne voie. Il a dû se défendre, je sens encore l’odeur du sang... J’espère que ce n’est pas le sien... - Je suis certain qu’il n’a rien ! assura Nicolas. Dépêchons-nous, plus nous attendons, plus il risque de lui arriver malheur. Ariane redoubla d’effort, perdant Nicolas dans son sillage, mais le jeune homme s’efforça de tenir la distance, comprenant ses craintes et ne voulant pas devenir un fardeau pour elle. Quelques instants plus tard, la lumière se fit plus présente alors qu’ils approchaient du bord du littoral. Ils risquèrent un regard à l’extérieur. Le soleil les aveugla lorsqu'ils émergèrent après plusieurs heures dans l'obscurité des fonds sous-marins, mais le tumulte en surface ne leur laissa pas un moment de répit. À quelques mètres d'eux, un attroupement d'humains criait et se mouvait dans tous les sens sur le ponton du port. La foule était tellement dense qu'ils ne voyaient rien, mais la raison de leur émoi semblait évidente à Nicolas. La présence d'une sirène dans le port d'une petite commune du Bassin d'Arcachon, ça fait du bruit ! Ariane s'élança, mais Nicolas la stoppa dans son élan et prit les devants pour qu'elle ne se fasse pas capturer à son tour. Il atteignit rapidement le ponton, l'escalada et se joignit à la foule en ébullition pour se rapprocher au maximum du centre de l'attention. La sirène retint son souffle en attendant la suite des événements. Sans crier gare, la foule se mit à courir en tous sens, visiblement effrayée, découvrant la scène centrale aux yeux d’Ariane. Malo se trouvait au sol et se dépêtrait d'un filet en lambeaux, étalé autour de lui, pendant que Nicolas se battait à mains nues avec l'un des pêcheurs, blessé à l'épaule et visiblement ivre de colère. "Courageux, mais pas téméraires, ces humains !" songea Ariane en constatant qu'ils avaient fui à la libération de son frère. Ce dernier se tortillait pour se défaire de ses liens. Ariane le rejoignit rapidement à la nage et lui prêta main forte, sous couvert de la mer, avant de l'attirer avec elle dans les flots. Nicolas décocha un dernier coup de poing à l'un des pêcheurs avant de prendre la fuite à son tour et de les rejoindre dans l'eau. Il n'eut pas le temps d'atteindre la mer qu'il trébucha, saisi à la cheville par l'homme qu'il avait envoyé au tapis, visiblement furieux qu'on lui ait ravi sa proie. - Nicolas ! hurla Ariane, désemparée. Ce dernier se retourna promptement afin de se défendre mais reçu un violent coup à la tempe. -Nicolas ! entendit-il hurler une dernière fois Ariane avant de sombrer dans l’inconscience.mp;gt; Son prénom résonna en écho de nombreuses fois tandis qu’il errait dans les ténèbres, jusqu’à ce que son corps s’agite de secousses. Il ouvrit violemment les yeux en espérant être enfin en sécurité dans les eaux du Bassin. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il se retrouva de nouveau sur la plage, nez à nez, avec Juliette, complétement affolée. Il prit sa tête dans ses mains, son crâne le faisait atrocement souffrir. - Tu m’as fait une peur bleue ! reprocha Juliette. Je t’attendais mais tu n’es jamais venu et je viens de te trouver ici, inconscient. Il regarda autour de lui, hagard. Il était de retour sur le sable de sa petite plage au milieu de ses affaires. Il ne sut jamais s’il avait rêvé ou s’il était rentré grâce à l’aide de ses amis aquatiques. Il aurait juré voir un reflet bleu s’enfonçait dans les flots à son réveil ! Il n’osa jamais en parler à Juliette et ne pourrait jamais en être sûr, mais ce soir-là, il s’endormirait serein de les savoir en sécurité. Il ne se remettrait jamais en revanche de n’avoir pu conserver cet anneau aux reflets argentés qui lui aurait permis de les revoir... Qui sait ?
Mélissa CONTE: Entre Terre et Mer
Nous sommes le 20 juin 1936. Ce jour-là, il fait très chaud, le soleil réchauffe les andernosiens, mais un petit air marin, frais et iodé, rend la balade très agréable en bord de mer, que ce soit sur la plage ou sur les ports ostréicoles. D'ailleurs c'est ce jour-là que le petit Bernard fit une incroyable découverte ! Bernard est un petit garçon de 6 ans qui a des yeux rieurs, un sourire charmeur, des cheveux en bataille, et cette date est très spéciale pour lui, puisque c'est le jour de son anniversaire ! Étant un grand gourmand, il demande alors à ses parents : " Papa, maman, ze voudrais aller manger des huîtres au port, siouplait ? Pour mon anniversaire !" suivi d'un grand sourire à croquer. Avec cette demande si mignonne et ce joli minois, sa mère ne pouvait pas le lui refuser : " Allons-y mon petit loulou, nous irons chez Huguette tout au bout du port, les huîtres y sont délicieuses, et le paysage est splendide ! Tu vas adorer !" Sur ces mots, le petit Bernard enjoué, prit son chapeau, ses lunettes de soleil et ses sandalettes : il ne s'était jamais muni de toutes ses affaires aussi vite ! Ses parents échangèrent un regard complice et rempli d'amour. "On y va à vélo ?" Proposa le papa de Bernard. Ni une, ni deux, Bernard enfourcha son vélo et commença la route vers le port, avant que ses parents ne le rejoignent. Une petite virée au centre d’Andernos, en continuant de longer la plage, puis la petite famille admire la belle église St Eloi et ça y est, ils peuvent apercevoir les cabanes typiques de ce port pittoresque. Arrivé tout au bout de la quatrième darse, il aperçoit un visage familier. « Et bonjour mon petit, Didon qu'est-ce que tu as grandi ! La dernière fois que je t'ai vu tu étais comme ça ! » Dit-elle en montrant une taille qui semble vraiment minuscule à Bernard ! "Mon petit loulou, cette dame c'est ta cousine Huguette, c'est elle qui tient ce restaurant" lui explique sa maman. "Et bah les cousins, suivez-moi que je vous installe à ma meilleure table" dit la grande femme costaud, avec son accent typique du bassin. Bernard et ses parents s'exécutent. Une fois installé, haut perché sur un mange debout, le petit "loulou" est aux anges ! " Cousine, ze voudrai une douzaine d'huitres siteplait ?! J'adooooooooore les huîtres et c'est mon anniversaire " s'exclame Bernard ! Ses parents commandent à leur tour, et dix minutes plus tard... ça y est le grand moment est arrivé... Les assiettes arrivent ! Les yeux du mignon petit garçon brillent de mille feux. Il gobe alors une huître, puis 2, puis 3, en croquant un peu pour avoir une explosion de saveur dans la bouche... Puis vient le tour de la quatrième, il croque et là... Oh oh... il sent quelque chose a choisi sous la dent. "Pourtant une huître, ça n'a pas de noyau" se dit-il. Il recrache alors pour voir ce qui se cache dans sa bouche. C'est rond, dur, blanc et sa brille... Bernard n'avait jamais vu quelque chose d'aussi beau ! "Oh mon p'tit gars, tu as trouvé une perle dans ton huître !" Dit le papa de Bernard. Il continue de la contempler de très près quand, tout à coup, il voit une ligne dorée scindé la perle en deux, la partie supérieure de la perle est expulsée à toute vitesse dans un nuage de poudre arc-en ciel et pailletée ! Bernard toussote avec toute cette "poussière"... Et devant les yeux ébahis de la famille andernosienne, une fée magnifique déploie ses ailes. Elle a de longs cheveux tressés aux couleurs de l'arc-en-ciel en plus pastel, une robe bustier courte nacrée et de petits escarpins munis de mini perles sur le dessus, ses ailes sont roses poudré pailletées d'un millier de mini perles. Elle commence alors à parler et une petite voix fluette sort de ce petit être. " Bonjour, je m'appelle Ostrea, cela fait longtemps que j'attends pour sortir ! Je suis la fée des huîtres ! " Huguette n'en revient pas...<br>"Alors ça y est... Ça y est, ça a marché !" Dit-elle en se frottant les yeux ! Devant le regard perdu de ses invités, elle explique alors : "il y a 3 ans de ça, c'était une année compliquée pour l'ostréiculture, entre les prédateurs de l'huitre et le dinophysis, j'avais perdu plus de la moitié de mes huîtres, j'ai donc voulu créer une fée pour veiller sur mes petits coquillages, et j'avais lu dans le manuscrit de mes ancêtres, qu'en mettant un grain de sable rose dans une huître, une fée pouvait être créée. Suis alors allée à la dune du Pilat et j'ai fouillé le sable pendant des jours et des jours, pour enfin trouver l’un des cent grains de sable rose que possède la dune du Pilat... Et nous voilà aujourd'hui !" Bernard ouvre grand ses yeux, il n'en revient toujours pas... Huguette continue : " Bonjour Ostrea, je suis Huguette ta créatrice, et je suis ravie de te voir aujourd'hui ! Tu ne sais pas à quel point je t'attendais!" Ostrea rougit à l'écoute de ses belles déclarations. Et Huguette enchaîne alors : " D'ailleurs, maintenant que tu es là, ma beauté, pourrais-tu aller faire un tour dans l 'eau iodé de notre si beau bassin, pour vérifier que tout se passe bien ?!" Ostrea hoche alors la tête :<br> "J'y vais de ce pas, je reviendrai demain soir à 19h pour vous faire un rapport !" Elle fait un grand plongeon, nage, et nage encore pour rejoindre l'île aux oiseaux, elle fait alors le tour des parcs... Tout va bien ! Elle longe le village de l'herbe, la vigne, le Mimbeau... Rien à signaler ... Elle continue donc son périple jusqu'au banc d'Arguin... Et là, au loin, elle semble reconnaître une armée entière de dinophysis... C’est une algue qui ressemble à une punaise rouge avec des pinces, des pattes et une queue de poisson... Et il y en a 100, 1000, 10000... Impossible de savoir combien exactement. Ostrea commence à paniquer... Comment pourrait-elle faire pour protéger les huîtres de cette armée de dinophysis ? Qui pourrait lui venir en aide ? Car toute seule, elle ne pourra jamais gagner ! Prise de panique, elle revient sur ces pas, les larmes aux yeux, elle s'arrête au pied d'une cabane tchanquée... "Comment vais-je faire ?! Je ne sais même pas quels pouvoirs je possède et comment les utiliser... Et je suis toute seule... Ostrea sanglote, et pour essayer de trouver quelques bras, pinces ou nageoires pour l'aider à vaincre cet immense groupe d'envahisseurs, elle chantonne " ohééé ohééé, mes amis, venez tous nous sauveeer". Et elle reprend de plus belle... Au bout de 2 ou 3 chansonnettes, elle s'arrête et soupire en voyant l'inefficacité de sa chanson d'alarme. Elle se recroqueville alors sur elle-même, et pleure la tête entre ses bras croisés. Elle est désespérée, et elle se demande comment réagira sa créatrice si elle lui rapporte les faits. </span><span>Une fois calmée, elle relève la tête et, contre toute attente, une armada de mollusques, coquillages et poissons en tous genres lui font face ! C'est donc cela son pouvoir, parler aux animaux marins par le chant et pouvoir communiquer avec eux ! Reboostée à fond, elle chante alors : "Merciiiii les amis, préparez-vous pour la gueeeerre, nous allons réduire ces inconvénients en poussière". Ostrea ouvre alors la marche, cap sur le banc d'Arguin ! La troupe des protecteurs est alors arrivée à bon port pour participer à la défense, ils se préparent tous à faire face à Dinophysis. La première rangée d'algue attaque. Pour la contrer, les hippocampes projettent avec leurs trompes, des petits bouts de coquilles afin de transpercer les algues. Une autre vague de Dinophysis arrive et c'est au tour des seiches et des soles de les exterminer, les seiches propulsant leurs ancres gluantes pour les coller au sol, quant aux poissons plats, ils font rouler les "punaises rouges" sur leurs dos pour les faire glisser jusqu'à l'océan. Malheureusement quelques soles se font blesser par les pinces de leurs adversaires et une plus amochée que les autres perd même la vie. Une centaine de dinophysis s'approche encore, et les étrilles les découpent en tout petits morceaux avec leurs pinces tranchantes. C’est à ce moment-là,qu’une étrille toute gringalette perdu le combat face à une "punaise rouge" qui lui arracha sa pince avec la sienne. C’est alors que la dernière lignée de dinophysis s’avance, les raies viennent en aide à Ostrea afin de les repousser. D'un battement d'ailes, les raies font apparaître un tourbillon de courant qui projette les nuisibles tout droit dans l'océan, Ostrea participe également à cette attaque. Grâce à son chant très aigu, elle arrive à former une vague extrêmement violente qui ravage toute l'armée restante de dinophysis et les renvoie tout droit dans l'océan. Cette énorme troupe est prise dans un courant et est éjectée bien plus au sud. Le bassin et ses huîtres sont sauvés grâce à Ostrea et tous ses amis qui lui ont prêté main forte ! "Merci à tous de m'avoir aidée à combattre ces monstres pollueurs d'huîtres, vous êtes vraiment des amis loyaux, et grâce à vous l'équilibre du Bassin et de ses habitants est maintenu, nous garderons toujours en mémoire nos amis partis pour cette cause" Après ce discours touchant d'Ostrea, tous reprennent le cours de leur vie avec une petite part de chagrin en eux. Ostrea, se retrouvant de nouveau seule, se remémore cette incroyable lutte offerte de ses amis, elle lève les yeux au ciel... "Mince, mais quelle heure est-il ? Je vais être en retard pour faire le rapport à mon adorable créateur !" En 6 coups d'ailes, elle est plus rapide qu'une fusée traversant la couche d'ozone, et la voilà arrivée au port d'Andernos. Au loin, Huguette, Bernard et ses parents l'attendent en la saluant. "Alors ma petite gringalette, qu'as-tu à me raconter ?" Dit Huguette de toute sa bienveillance. Ostrea lui raconte alors toute cette aventure, l'aide apportée par les raies, les soles, les seiches, les étrilles, les hippocampes pour venir à bout de l'armée de dinophysis, elle lui raconte la perte de quelques-uns de ses amis et lui expliquent qu'elle a découvert ses pouvoirs magiques grâce à cette guerre "passe-bassin". C'est alors que le petit Bernard a présenté une excellente idée : " Pour célébrer la victoire des animaux du Bassin, organisons une grande fête avec de la musique ! Et comme Ostrea a une très belle voix, peut-être qu'elle pourrait chanter sa victoire !?" Depuis ce jour, pour célébrer la victoire d'Ostrea sur l'armée du dinophysis, nous lui rendons hommage tous les ans, le 21 juin, en fêtant la musique.
Célia KUPPE: L'incroyable aventure d'OSTREA